En raison de la propagation de la syphilis, l’impératrice Marie-Thérèse interdit toutes les prostituées à Vienne, et à partir de 1768, les femmes autrichiennes commencèrent à vendre leurs charmes dans la capitale hongroise.
À l’époque, les femmes proposaient leurs services dans les rues, dans les lieux de divertissement, autour du pont de bateaux près de Vigadó, dans les tavernes, les auberges et sur les marchés.
Au début des années 1800, les bordels les plus connus des classes inférieures de Pest-Buda opéraient à Kék Kakas(aujourd’hui rue Székely Mihály), parmi lesquels l’établissement de Luft Rézi était le plus populaire.
Les nobles et citoyens fortunés louaient des chambres privées ou assouvisaient leurs désirs dans les bains thermaux. Les femmes devaient maîtriser les jeux de cartes, la musique, le chant et l’art de la conversation.
À la surprise de l’Europe, le premier bain mixte fut ouvert en 1811 aux Bains Rácz à Buda.
Après l’échec de la Révolution hongroise de 1848–49, l’absolutisme impérial toléra la prostitution à Pest et à Buda, car elle contribuait à apaiser les tensions sociales.
Sous la direction de la police du baron József Prottmann, certaines prostituées agirent également comme informatrices, dénonçant les patriotes cachés.
Le premier grand lieu de divertissement, le « Neue Welt », ouvrit en 1861 sur le site de l’actuel Vígszínház. Construit par les frères Tüköry et dirigé par le chef du milieu Tóni Linzer, l’établissement de 500 places présentait une troupe de danseuses entièrement nues, qui pouvaient ensuite être emmenées dans des chambres privées.
Des établissements similaires incluaient :
Anker Saal (près de l’Opéra actuel),
des salles de concert-bordels comme Jó meleg akolhoz,
et plusieurs cabarets de la rue Király, tels que :
Mandl Mulató, Bon Pasteur, Canard Denté, Salle Flóra, Walhalla, Chat Rouge, Chat Noir, Chat Tacheté, Chat Bleu, et le Foliès Caprice (dans l’Hôtel de Ville).
En 1872, Budapest devint le centre mondial de la traite des êtres humains.
Le commerce des jeunes femmes était orchestré par Thaisz Elek, le premier chef de police de la ville, et son épouse Reich Fáni, une maquerelle qui contrôlait le milieu hongrois.
Leurs agents recrutaient de la « chair fraîche » non seulement dans les régions les plus pauvres du Royaume de Hongrie, mais aussi dans les Balkans et en Europe de l’Est.
Les femmes hongroises exportées en Russie eurent tant de succès que, même à l’époque soviétique, toutes les prostituées — quelle que soit leur origine — étaient appelées « vengerka » (венгерка), mot dérivé du nom russe de la Hongrie, « Vengrija » (Венгрия).
De la même manière, les femmes hongroises exportées en Amérique centrale et du Sud rencontrèrent un succès considérable.
Comme les belles Hongroises s’adaptaient plus facilement à leur profession forcée que les femmes noires, métisses ou autochtones, le terme « húngara », signifiant « fille hongroise », devint synonyme de femme légère, danseuse, ou prostituée dès les années 1860.
Dans des pays comme l’Argentine, le Venezuela, l’Uruguay, le Brésil et Cuba, où l’on signalait jusqu’à 80 % de pénurie de femmes, la population augmenta de près de 11 % grâce aux femmes hongroises trafiquées par les mafias de Budapest.
La prostitution fut réglementée pour la première fois en 1867, exigeant une licence, une taxation régulière et des contrôles sanitaires.
En 1882, on comptait 80 bordels, 43 cafés offrant des services sexuels, et 1 700 prostituées de rue à Budapest.
Bien que la prostitution ait été interdite en 1950, le régime communiste maintint secrètement des établissements de ce type pour ses fonctionnaires et les jeunes ouvriers venus construire le métro.
L’un de ces lieux se trouvait à 130 mètres d’ici, au troisième étage d’un bâtiment à l’angle des rues Király et Kis Diófa.
LES FILLES HONGROISES DE L’HISTOIRE : LE VOYAGE CACHÉ DES FILLES HONGROISES
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